
Je me rappelle, à Diourbel, de ce vieux sur la place du marché, qui chantait des xasaaid. Tellement il les entonnait à longueur de journée, il en était habité.
À force, sous le soleil et la pollution, il avait fini par user ses cordes vocales. Et il chantait malgré tout. Même en élevant la voix, les yeux fermés, les mains collées aux oreilles, on l'entendait de - plus en plus - loin, comme s'il parlait d'un endroit éloigné.
Les passants lui remettaient pièces, billets, fruits ... Était-ce par pitié ? Par respect pour son sacrifice ? Je ne saurais le dire... Il avait un timbre qui collait à la peau et habitait l'esprit, dès qu'on l'entendait.
Aujourd'hui, bien des vendeurs utilisent le numérique, certains enregistrent leur voix et la font jouer, pour mieux se faire entendre, se faire entendre plus loin et plus longtemps. Cela enlève une certaine âme à leur affaire certes, mais préserve leur santé, surtout à Dakar avec la pollution.
Avec ce stratagème, les variations de ton que leur humeur du moment donnait à leur déclamation disparaissent, la rendant plus monotone et neutre.
Mais telle est une clef de survie pour eux, pour elles.
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